Polluants organiques persistants : l’Agence recommande à titre conservatoire de ne pas consommer les œufs des poulaillers domestiques en Île-de-France

Communiqué de presse

Après une alerte sur la concentration de dioxines dans des œufs non-commercialisés issus de poules élevées dans des poulaillers urbains domestiques près de l’incinérateur d’ordures ménagères situé à Ivry, l’ARS a décidé de mener une étude régionale des teneurs en polluants organiques persistants dans l’environnement urbain, mesurées dans 25 poulaillers domestiques volontaires pour cette étude.

Les premiers résultats mettent en évidence une contamination de l’ensemble des prélèvements de sols et d’œufs par les trois familles de polluants organiques persistants analysées (dioxines, furanes et PCB). Cela signifie que ces trois familles de polluants organiques persistants sont potentiellement présentes dans tout l’environnement urbain, et non pas spécifiquement aux abords des incinérateurs.

L’Agence préconise donc, dans l’attente de l’analyse définitive, de façon conservatoire et prudentielle, la non-consommation des œufs et des produits animaux de production domestique non contrôlée, sur l’ensemble de la région francilienne.

L’étude réalisée par l’Agence porte sur 25 sites volontaires, dont 14 situés à proximité des trois principaux incinérateurs de déchets autour de Paris (Ivry-sur-Seine, Issy-Les-Moulineaux, Saint-Ouen) et 11 qui en sont éloignés. Les prélèvements ont été analysés par le laboratoire LABERCA, référent national pour les polluants organiques persistants, en mars 2023. Cette étude ne concerne pas les productions d’œufs intégrés à une filière commerciale, qui font l’objet de contrôles prévus réglementairement.

Les résultats de l’étude menée par l’Agence mettent en évidence une contamination de l’ensemble des prélèvements par les trois familles de polluants organiques persistants analysées (dioxines, furanes et PCB), signifiant que ces trois familles de polluants organiques persistants (POP) sont présentes dans tout l’environnement urbain, et non pas spécifiquement aux abords des incinérateurs. Parmi les 25 sites analysés, deux présentent des teneurs particulièrement élevées en PCB dans les œufs (40 à 50 fois les seuils réglementaires européens pour les œufs commercialisés). Il s’agit de deux sites éloignés de plus de 3 km de tout incinérateur. Les propriétaires des deux poulaillers ont été informés, en leur recommandant de ne plus consommer leurs œufs.

L’interprétation des résultats est toujours en cours pour analyser les niveaux de contamination relevés en fonction des éléments de contexte environnemental et des pratiques d’élevage. Le rapport complet de l’étude sera rendu public à la fin du premier semestre 2023.

L’origine de ces contaminations n’est pas encore établie, des investigations complémentaires sont en cours, et les mairies concernées sont tenues informées. Il a également été recommandé aux 21 propriétaires des poulaillers dont les œufs ne répondent pas aux normes de ne plus consommer leurs œufs.

Enfin il est important de noter que plusieurs poulaillers présentent des contaminations faibles, pouvant probablement s’expliquer par des pratiques d’élevage évitant une contamination des poules dans leur environnement. Les propriétaires ont également été informés et sollicités pour recueillir leurs pratiques d’élevage.

L’ARS rappelle que la consommation régulière d’aliments contaminés par des dioxines et des PCB entraîne une imprégnation progressive de l’organisme[1] qui peut avoir des effets sur la santé à long terme, comme une augmentation du risque de cancer, de troubles de la fertilité et de la grossesse, d’effets métaboliques comme le diabète par exemple et des effets perturbateurs endocriniens. Il n’existe aucun traitement pour éliminer ces substances de l’organisme. La principale mesure de prévention consiste à éviter la consommation de produits alimentaires les plus contaminés.

Ces éléments conduisent l’Agence Régionale de Santé à préconiser, sans attendre l’analyse définitive, de façon conservatoire et prudentielle, la non-consommation des œufs et des produits animaux de production domestique non contrôlée, sur l’ensemble de la région francilienne. Cette recommandation s’applique tout particulièrement à Paris et en petite couronne, ainsi que dans les zones urbaines denses de la grande couronne.

Pour rappel, des recommandations à l’attention des particuliers figurent dans le « Petit guide de l’autoconsommation en toute sécurité » publié par le ministère de la santé et de la prévention.

 

Annexe - Rappel sur les polluants organiques persistants (POP)

Parmi les POP, on distingue différentes familles de composés dont les dioxines (PCDD), les furanes (PCDF) et les polychlorobiphényles (PCB).

  • Les dioxines et furanes sont des sous-produits indésirables de la combustion des déchets (incinération des ordures ménagères, brûlage de déchets verts…) et de certains procédés industriels (blanchiment des pâtes à papier par exemple). Leur présence dans l’environnement est donc uniquement liée aux rejets passés ou actuels des incinérateurs et de quelques industries. 
  • Les PCB, dont la production est désormais interdite en France, étaient produits industriellement pour différents usages liés à leurs propriétés physico-chimiques (lubrifiant, isolant). Ils peuvent également être rejetés par les incinérateurs, mais dans une moindre proportion que les dioxines et furanes. Leur présence dans l’environnement est donc principalement due aux anciens usages en milieu urbain (adhésifs, huiles, peintures…) et à des pollutions accidentelles et localisées (par exemple une fuite d’huile dans les transformateurs électriques où le pyralène était utilisé comme isolant électrique).

Les POP ont une durée de vie longue dans l’environnement et y restent présents plusieurs décennies après l’arrêt complet des émissions. Ils sont lipophiles et se concentrent donc dans les tissus adipeux des organismes vivants, et s’accumulent tout au long de la chaine alimentaire. Les dioxines, furanes et PCB présentent une grande stabilité à la chaleur, sont peu biodégradables et ont une forte affinité pour les graisses. Ces molécules vont s'accumuler après ingestion dans les tissus graisseux contaminant ainsi les viandes, les poissons, les crustacés, le lait et les produits laitiers et les œufs riches en graisse. L'alimentation constitue donc la principale voie d'exposition pour la population générale.

La consommation régulière d’aliments contaminés par des dioxines et des PCB entraîne une imprégnation progressive de l’organisme qui peut avoir des effets sur la santé à long terme, comme une augmentation du risque de cancer, de troubles de la fertilité et de la grossesse, d’effets métaboliques comme le diabète par exemple et des effets perturbateurs endocriniens. Il n’existe aucun traitement pour éliminer ces substances de l’organisme. La principale mesure de prévention consiste à éviter la consommation de produits alimentaires les plus contaminés.

 

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