Inspections des établissements médico-sociaux : comprendre le rôle des ARS

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EHPAD

Les Agences régionales de santé (ARS) sont dotées d’un service d’inspection régionale autonomie santé (IRAS) composé de professionnels de santé, d’ingénieurs et de personnels administratifs. Ce service est chargé de mener les inspections des établissements sanitaires ou médico-sociaux, avec le concours d’autres agents de l’ARS ou en lien avec d’autres services publics.

Les Agences régionales de santé (ARS) sont dotées d’un service d’inspection régionale autonomie santé (IRAS) composé de professionnels de santé, d’ingénieurs et de personnels administratifs. Ce service est chargé de mener les inspections des établissements sanitaires ou médico-sociaux, avec le concours d’autres agents de l’ARS ou en lien avec d’autres services publics (Conseils départementaux pour les EHPAD par exemple).

L’inspection n’est pas le seul moyen de contrôle des établissements. Les interventions de l’inspection sont ciblées sur des situations sensibles ou préoccupantes. En dehors de l’inspection, des échanges réguliers ont lieu avec les établissements sur leur activité, dans le cadre des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM) pour ce qui concerne le secteur médico-social.

Les ARS traitent les réclamations d’usagers ou de familles qui lui sont adressées, ainsi que les signalements que les établissements sont obligés de lui adresser en cas d’événement grave. Toutes les réclamations et les signalements reçus sont traités par des équipes dédiées, indépendantes de l’inspection, ce qui permet d’assurer un premier niveau de réponse et de trouver des solutions dans un grand nombre de cas quand il s’agit de difficultés individuelles.

Ehpad : ce qu’il faut savoir

Les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) constituent la forme d'institution pour personnes âgées la plus répandue en France. Communément appelées « maisons de retraite », ce sont des établissements médicaux-sociaux médicalisés dotés de l’ensemble des services de soin, d’hébergement et de restauration, permettant d’accueillir des personnes âgées de 60 ans et plus, en perte d’autonomie. Un Ehpad peut être public, privé à but non lucratif ou privé lucratif.

La création d’un Ehpad est soumise à une procédure d'autorisation préalable conjointe du président du Conseil départemental et du directeur général de l'Agence régionale de santé (ARS). Elle ne peut se faire qu’après la délivrance d’une autorisation de fonctionnement délivrée par arrêté, au terme d’une procédure d’appel à projet. Cette procédure est très encadrée et est associée à des exigences de transparence et de publicité. Un comité de sélection détermine les projets d’Ehpad qui pourront recevoir une autorisation. L’autorisation n’est effective qu’après une visite de conformité ; elle est valable 15 ans et renouvelable après réception des résultats d’une évaluation externe.

Un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens (CPOM) est conclu dans chaque département, entre l'État, le Conseil départemental et le gestionnaire pour l’ensemble de ses établissements dans le département. Il fixe, pour une durée de cinq ans, les objectifs de qualité de la prise en charge des résidents et les moyens financiers de fonctionnement (budget soins attribué par l’ARS, budget dépendance attribué par le Conseil départemental, et fixation du tarif hébergement pour les places habilitées à l’aide sociale par le département).

Qui décide de mener une inspection dans un établissement et pourquoi ?

La vérification de conformité entre les objectifs et les moyens, et le contrôle de la qualité du service rendu, donnent lieu à un dialogue de gestion et, si nécessaire, à des missions d’inspection, qui concernent indifféremment tous les établissements, quel que soit leur statut juridique. Les inspections des Conseils départementaux portent sur la prise en charge de la dépendance et la prestation d’accompagnement autour du projet de vie des résidents (missions des aides-soignants, des psychologues et agents de service ; prestation d’animation ; prise en charge de la perte d’autonomie – incontinence, aide à la toilette, aide au repas…). Les inspections des ARS sont davantage axées sur la qualité des soins (supervision des soins par le médecin coordonnateur ; tenue des dossiers médicaux ; sécurité du circuit du médicament ; protocoles de soins ; qualité de l’accompagnement soignant...). Elles sont le plus souvent conduites conjointement et visent de façon commune au respect des droits des résidents et à un accompagnement adapté et individualisé.

Les inspections répondent à plusieurs objectifs. Chaque ARS établit chaque année un programme d’inspection qui répond, d’une part, aux priorités définies par le ministère des Solidarités et de la Santé dans le cadre des objectifs nationaux d’inspection et de contrôle, et d’autre part aux priorités propres à son territoire.

En dehors de ces opérations programmées, les inspections des ARS peuvent être mobilisées en urgence sur des situations d’une particulière gravité (risques importants et immédiats pour les patients, établissement ne pouvant plus assurer une activité normale...). Cela peut concerner autant des établissements (hôpitaux, EHPAD, établissements pour personnes handicapées…) que des professionnels individuels.

Une mission d’inspection menée par une ARS est formalisée par une lettre de mission, signée par le directeur ou la directrice générale de l’ARS, destinée au gestionnaire de l’établissement ou au professionnel inspecté. Elle précise le lieu, la date, la composition de la mission, ses objectifs.

Une inspection peut être annoncée ou inopinée. Les inspections annoncées sont plus adaptées aux situations portant sur des questions d’organisation et demandant de rassembler des documents particuliers ou en grand nombre ; les inspections inopinées sont plus adaptées aux situations de soupçons d’un défaut grave de prise en charge (matériel inadapté, ressources humaines manquantes…).

L’objectif d’une inspection est double : il s’agit de constater un dysfonctionnement, un écart avec les bonnes pratiques, un problème, et de recommander ou prescrire des solutions pour y remédier.

L’ARS s’inscrit donc autant dans une logique de contrôle que d’accompagnement, avec pour objectif prioritaire de favoriser la meilleure prise en charge possible, au bénéfice de l’usager. L’ARS intervient à la fois sur un volet répressif, notamment quand la sécurité est mise en cause, et dans une optique d’amélioration de la qualité du service rendu.

Qu’est-ce qui relève du champ des ARS ?

L’ARS a en charge le contrôle de tous les aspects liés au soin. Au-delà des Ehpad, ses missions d’inspection peuvent intervenir dans l’ensemble des établissements sanitaires (hôpitaux, cliniques, …) et du secteur médico-social, mais aussi auprès d’un praticien libéral, d’une structure réunissant des professionnels de santé, etc. Les inspecteurs peuvent avoir accès aux documents de l’établissement, mener des auditions (direction de l’établissement, salariés, ensemble des professionnels de santé qui lui sont rattachés).

Le champ d’intervention des inspecteurs est défini par le code de la santé publique. Pour ce qui concerne un établissement sanitaire ou médico-social, cela regroupe : l’organisation et le fonctionnement général de la structure ou de l’établissement ; le droit des usagers ; la conformité des équipements ; l’organisation des soins et la prise en charge médicale ; le respect des bonnes pratiques professionnelles ; les éléments d’environnement ayant un impact sur la santé  (qualité de l’eaux et de l’air, déchets, hygiène…) ; l’habitat et la qualité de vie ; la bonne mise en place d’animations et liens sociaux ; la prévention de la maltraitance ; la gestion des risques.

L’ARS est également compétente pour contrôler les dispositions sanitaires définies par le code de l’action sociale et des familles qui relèvent de son financement (contrôle des soins dans le cadre du maintien à domicile par exemple).

Qu’est-ce qui peut résulter d’une inspection ?

Programmées ou non, la plupart des inspections concernent des situations sans risque immédiat pour les usagers. La mission établit, à l’issue de son contrôle, un rapport qui indique les constats réalisés et propose des mesures d’amélioration ; il est adressé à l’établissement par la directrice générale de l’ARS. Ce rapport est assorti de mesures qui peuvent comporter soit des recommandations, dont la mise en œuvre est facultative, soit des prescriptions, qui ont un caractère obligatoire.

La procédure est contradictoire : un délai, allant de quelques jours à quelques semaines selon le degré d’urgence, est donné à l’établissement ou au professionnel inspecté pour répondre au rapport. Souvent, l’établissement ou le professionnel, corrige immédiatement certaines de ses pratiques. Au-delà, il doit présenter un plan d’actions, assorti d’un calendrier précis, et qui donne lieu à des points d’avancement réguliers avec l’ARS.

Dans une situation d’une gravité particulière (mise en danger des usagers), la lettre de décision prend la forme d’une injonction, et donne alors automatiquement lieu à une inspection de vérification.

Si les prescriptions ou injonctions ne sont pas suivies d’effet, l’ARS peut prononcer une suspension immédiate d’activité, à l’encontre d’un ou plusieurs praticiens, ou de la totalité de l’établissement – donnant généralement lieu à une mise sous administration provisoire, afin d’assurer la continuité de service dans l’intérêt des usagers (voir ci-dessous).

Les sanctions possibles

a) Sanctions administratives

En dehors des recommandations et des prescriptions, des mesures de police administrative peuvent être prononcées, dans le respect des principes de contradictoire et de proportionnalité des sanctions administratives : injonctions à remédier à des risques liés à la prise en charge, injonctions de remédier à un déséquilibre financier, astreinte journalière, interdiction de gérer toute nouvelle autorisation, sanction financière, administration provisoire par un autre gestionnaire, suspension voire cessation d’activité (qui demande de réorienter les personnes accueillies vers d’autres structures similaires).

b) Suites judiciaires

Des suites de nature judiciaire, notamment par le signalement (sans délai) au Procureur de la République de tout fait constaté lors du contrôle susceptible de constituer un délit ou un crime (art. 40 du code de procédure pénale).