Retour sur les Assises régionales « Accès aux soins et handicap »

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L'ARS Île-de-France a réuni le mercredi 15 novembre 2023, dans le cadre des Assises régionales « Accès aux soins et handicap », de nombreux représentants du secteur médico-social mais aussi des professionnels de santé de l’hôpital et de la ville. Objectif : construire un véritable parcours de santé pour les personnes en situation de handicap sur chaque territoire d’Île-de-France d’ici 2028.

L’accès à la santé des personnes porteuses de handicap est une priorité partagée des pouvoirs publics, qui a été rappelée lors de la Conférence nationale du handicap (CNH) du 26 avril 2023. Un sujet sur lequel l’ARS Île-de-France s’est largement mobilisée depuis plusieurs années, et va accentuer ses actions notamment dans le cadre du Projet régional de santé 2023-2028.

Pour construire le parcours en santé des personnes porteuses de handicap, il est nécessaire de construire une véritable articulation avec l’ensemble des professionnels, quel que soit le secteur et renforcer notamment sur chaque territoire les liens entre l’hôpital, le médico-social et la ville. L’objectif est une meilleure coordination de tous ces acteurs du soins afin d’améliorer à terme l’accès à la santé de chaque personne en situation de handicap.  

C’est dans ce contexte que l’Agence a organisé, le 15 novembre 2023, les 1ères Assises régionales « Accès aux soins et handicap », qui ont réuni plus de 200 personnes dans les locaux de la CRAMIF. Cette journée d’échanges a permis de faire connaître à l’ensemble des acteurs présents (professionnels de la ville, de l’hôpital, du secteur médico-social, représentants des usagers et des associations) les dispositifs déjà mis en place en Île-de-France.

Suite au partage d’expériences concrètes (parcours prioritaires, articulation ville-hôpital et médico-social …), l’engagement des professionnels et l’implication de tous ont été partagés pour acter les facteurs clés attendus pour répondre aux défis à mener.


L’accessibilité à la santé des personnes vivant avec un handicap est un sujet majeur de santé publique. Ces assises doivent être, selon moi, le point de départ d’une nouvelle dynamique que souhaite porter l’ARS Île-de-France à vos côtés pour répondre aux défis qui nous attendent sur ce sujet. » Amélie Verdier, directrice générale de l’ARS Île-de-France.


Cette journée a été animée par Franck Seuret, journaliste.

Accéder au programme de la journée :

 

Etat des lieux et perspectives 

Une journée en présence d’un grand témoin Jérémie Boroy, président du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH).

Pour démarrer cette journée, une conférence inaugurale sur le thème « Ethique et handicap » par Fabrice Gzil, co-directeur de l’espace éthique Île-de-France.  

 

Des idées fortes à retenir :

  1. Reconnaître chaque personne dans son humanité et sa dignité, et dans sa singularité
  2. Considérer la personne avant son handicap
  3. Chacun devrait pouvoir bénéficier de la meilleure vie possible et de la meilleure qualité de vie possible (autonomie de vie)
  4. Garantir à tous un accès équitable à des soins et à des aides appropriés
  5. Rien pour nous sans nous !

Une proposition concrète : élaborer une charte « éthique et accompagnement dans le champ du handicap » avec une consultation très large auprès des professionnels, des personnes en situation de handicap et de leurs proches, en lien avec l’Espace éthique Île-de-France.

Intervention de Fabrice Gzil

Les tables rondes

Une première table ronde intitulée « L’accès aux soins des personnes handicapées : où en sommes-nous ? » s’est intéressée aux données de santé, qui permettent d’évaluer les besoins, et guider les actions. Pascal Jacob, président de Handidactique, a présenté les dernières données du baromètre Handifaction (enquête auprès des usagers), qui montre que notre région accuse toujours un taux de personnes handicapées non soignées de l’ordre de 20%, contre 18% au niveau national. Le taux de refus de soins est de 14% (13% au niveau national), mais de l’ordre de 14% à Paris, et 16% en Seine-et-Marne. Les outils de la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES), pour identifier les personnes en situation de handicap et évaluer leur santé ont été présentés par le Dr Elisabeth Fery-Lemonnier, conseiller médical. La discussion s'est élargie ensuite avec le Dr Claire Morgand, de l'ARS Île-de-France sur le dépistage, la prévention, et les missions de l'ARS, soulignant son engagement à accompagner au plus près les personnes en situation de handicap en se basant sur des données de diagnostic approfondies.

Pour introduire la seconde table ronde, le Dr Philippe Denormandie, chirurgien neuro-orthopédiste et conseiller santé MNH, a souligné l'évolution du secteur du handicap, mettant en avant l'importance d'intégrer la parole de la personne dans son parcours de soins et la notion de prévention, impliquant également les soignants et les aidants.

Plusieurs acteurs sont ensuite venus partager les initiatives réussies. Aux côtés de Arnaud Corvaisier, directeur de l’offre de soins de l’ARS Île-de-France, le Pr Catherine Paugam, directrice adjointe de l'AP-HP, a présenté plusieurs dispositifs déployés : la plateforme Handiconsult du CH Pitié-Salpêtrière, le projet TPE (télémédecine pour les enfants polyhandicapés) et affirmé sa volonté de participer aux côtés de l’ARS Île-de-France à la mise en place notamment de « HandiBloc ». Ce dispositif, expérimenté au CH de Rennes, permet sur un même créneau de réaliser plusieurs interventions au cours d’une même anesthésie générale.

Jean-Michel Gayraud, directeur de l’Institut mutualiste Montsouris (IMM), établissement de référence en matière de gynécologie-obstétrique et de périnatalité et handicap, a évoqué notamment la mise en place d’une consultation gynécologique spécialisée dans une logique « d’aller-vers ». L’IMM prévoit un projet plus global de développement des parcours de soins des personnes handicapés dans l’établissement.  Enfin, Hélène Neffati, présidente de la CPTS d’Aulnay-sous-bois, seule CPTS en Île-de-France portée par un acteur du secteur médico-social a expliqué comment elle avait notamment mobilisé les acteurs de son territoire pour mettre en place une série d’outils (mallette de télémédecine, numéro d’appel unique) et de formations dans l’objectif d’apporter une meilleure réponse au suivi des personnes porteuses de handicap.

 

Retours d’expériences

L’après-midi, plusieurs acteurs se sont succédés pour évoquer des parcours et des dispositifs spécifiques.

Le dispositif « HandiConsult » est un centre de consultation en soins somatique dédié pour les personnes en situation de handicap (enfants et adultes) hébergées en ESMS ou à domicile, pour lesquelles l’accès aux soins en milieu ordinaire s’avère souvent difficile. Il concerne tous types de handicap (moteur, visuel, auditif, psychique, intellectuel).

Le Dr Wanda Yekhlef, cheffe du pôle Cristales et le Dr Paul Joly, médecin généraliste de l’EPS de Ville Evrard (Seine-Saint-Denis), ainsi que le Dr Chloé Tambosco et Hervé Pigale, directeur du centre de santé du Val Consul’t à l’institut du Val Mandé (Val-de-Marne) ont ensuite retracé chacun l’origine et l'évolution de leur dispositif respectif, détaillant l’organisation mise en place pour accompagner vers le parcours de soins de chaque personne qui sollicite le centre : la prise de rendez-vous sur la plateforme, un contact avec une infirmière de la structure d’origine pour identifier les besoins, parfois la nécessité de prévoir une consultation « blanche » et enfin l’accueil de la personne à l’Handiconsult pour des consultations de médecine générale ou de spécialistes selon les besoins et les pathologies identifiées.

 

En Île-de-France, 6 HANDICONSULT sont déjà déployés et sont opérationnelles :

A terme, c’est une HANDICONSULT par département qui est prévue pour répondre aux besoins de ces populations, avec la mise en place d’une coordination entre les centres, pour un échange de pratiques, d’outils et de procédures.

 

Le Dr Florian Laurent, de l’ARS Île-de-France et le Dr Aude Monnier Da Costa, présidente du réseau RHAPSOD’IF ont mis en évidence l'importance de la santé buccodentaire pour les personnes en situation de handicap.


 La santé, ça commence par la bouche. Il est assez difficile d’être en bonne santé générale si nous ne sommes pas en bonne santé buccodentaire. » Florian Laurent, directeur de projet santé orale à l’ARS Île-de-France


Le réseau RHAPSOD’IF (réseau Handicap Prévention et Soins Odontologique Ile-de-France) propose deux types d’actions pour améliorer la santé orale des personnes handicapés ; d’une part des actions de prévention et de dépistage couplée à la formation des professionnels dans une démarche « d’aller-vers » pour les ESMS handicap et des actions de coordination de soins ; l’objectif étant d’orienter chaque personne handicapée vers le lieu de soins le plus adapté à ses besoins.

En savoir plus sur les missions du réseau RHAPSODIF

 

En ce qui concerne le parcours gynécologique, Isabelle Derrendinger, présidente de l’Ordre national des sages-femmes et Benjamin Vouhé, chef de projet de la démarche Handigynéco Île-de-France ont exposé les constats qui ont mené à déployer les actions de la démarche Handigynéco pour la France entière.

Des constats alarmants pour cette population sont à souligner : « 42% des femmes en situation de handicap n’ont pas accès à la gynécologie de prévention. Par ailleurs, neuf femmes autistes sur dix déclarent avoir été victimes de violences sexuelles, physiques ou psychologiques dans le contexte familial et/ou en établissement » a rappelé Isabelle Derrendinger.

En réponse, la démarche Handigynéco, qui fait suite à l’expérimentation Handigynéco en pratique réalisée en  Île-de-France, prévoit que des sages-femmes libérales volontaires, formées aux spécificités des handicaps, puissent intervenir dans les établissements médico-sociaux médicalisés, dans une démarche « d’aller-vers », pour réaliser des actions selon trois volets :

  • Un volet soins, pour faciliter l’accès aux soins gynécologiques grâce à la mise en place de consultations gynécologiques longues individuelles auprès des femmes en situation de handicap ;
  • Un volet Vie Affective et Sexuelle (VAS), pour informer, former et accompagner sur la nécessité d’un suivi gynécologique tout au long de la vie ;
  • Un volet Violences Faites aux Femmes (VFF), pour appréhender cette thématique au sein des ESMS

Pour ces deux volets, des ateliers collectifs sont organisés pour les personnes en situation de handicap (hommes et femmes), et pour les professionnels. A la fin de l’année 2023, trente-six sages-femmes auront rejoint la Démarche Handigynéco en Île-de-France pour intervenir dans plus de 120 établissements (70 sont nécessaires pour déployer la démarche en Île-de-France).

Enfin, Céline Poulet, secrétaire générale du Comité Interministériel du handicap (CIH) a insisté sur la nécessité de pouvoir disposer dans chaque région d’un lieu de ressources pour répondre aux demandes sur ces sujets des personnes en situation mais aussi des professionnels des établissements médico-sociaux. Lydie Gibey (directrice du CREAI et du Centre ressource Intimagir sur la vie affective et sexuelle, la vie intime, affective et sexuelle, et le soutien à la parentalité) s’est jointe à la table-ronde pour présenter les missions et la dynamique du Centre Intimagir d’Ile-de-France.

En savoir plus sur la démarche Handigynéco

Clémence de Kerlivio, de l'OMEDIT Île-de-France a souligné la complexité de la prise en charge médicamenteuse en ESMS handicap. C'est pourquoi l'OMEDIT, en lien avec l’ARS Île-de-France, a élaboré Archimed handicap, un outil d’autoévaluation du circuit du médicament. Cet outil permet aux établissements de gérer les risques liés à la prise en charge médicamenteuse, offrant ainsi aux structures un moyen de sécuriser ce processus.

En complément, des formations collectives sur ce sujet sont aussi proposées aux professionnels de ces structures, voire un accompagnement individuel si de besoin. Le webinaire de lancement pour 2024 a été annoncé lors des assises et aura lieu le 25 janvier 2024.

En savoir plus sur les prochaines formations de l’OMEDIT destinées aux ESMS handicap.

Enfin, la journée s’est terminée par la présentation par le Dr Isabelle Tangre de la Staraqs et le Dr Victoire Roussel de la MAS de l’hôpital Nord (92) du Guide 24 fiches = 24 symptômes. Ce guide a été créé pour guider les professionnels dans certaines situations d’urgence et/ou inhabituelles auxquelles ils peuvent être confrontés dans leur exercice quotidien au sein de leur établissement. Il s'adresse d’une part aux infirmières (IDE), mais également aux aides-soignants (AS) et aides médico psychologiques (AMP), aux éducateurs spécialisés (AS) et aux accompagnateurs éducatif et social (AES). L’objectif est de proposer les bons réflexes pour chaque professionnel devant chaque symptôme. Ces fiches ont été réalisées et validées en collaboration avec une équipe pluridisciplinaire de professionnels exerçant en secteur médico-social handicap.

En savoir plus sur Coactis Santé et la STARAQS

La journée s’est clôturée par un mot d’Isabelle Bilger, directrice de l'autonomie de l'ARS Île-de-France, qui a évoqué les perspectives et projets futurs : « Un fil rouge doit nous animer : le respect des droits des personnes, l’écoute, l’éthique et la dignité dans leur accompagnement. On mesure le chemin qu’il nous reste à faire, mais je veux rester sur une note positive qui a émaillé l’ensemble de ces tables rondes. C’était vraiment l’objectif de la journée de faire témoigner le dynamisme de tous les porteurs sanitaires, médico sociaux. »