Crack : un continuum de prise en charge en santé centré sur le parcours des usagers

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Dans le cadre du Plan Crack d’Île-de-France, l’ARS se mobilise pour accompagner les consommateurs, de la rue aux soins et au changement de vie, à travers plusieurs dispositifs.

Apparu à Paris dans les années 1990, le crack est un problème de santé publique particulièrement préoccupant dans le nord-est parisien. Dérivé très addictif de la cocaïne aux effets puissants et rapides, il peut entraîner de graves complications psychiatriques, somatiques et sociales. En outre, ces dernières se conjuguent souvent à d’autres facteurs de fragilité (polyconsommation de drogues, parcours de vie traumatiques, troubles psychiatriques préexistants, vie à la rue…), faisant des consommateurs réguliers des personnes particulièrement vulnérables.

Un plan crack coordonné et mutualisé

Face aux problématiques spécifiques que pose l’addiction au crack dans le nord-est de Paris en matière sociale, de sécurité et de santé publique, l’ARS Île-de-France est engagée depuis 2019 dans un « plan crack » aux côtés de la préfecture de Paris et de la région Île-de-France, de la préfecture de police de Paris, du parquet de Paris, de la Ville de Paris, et de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (MILDECA). L’enjeu de ce dispositif : mener une politique coordonnée et mutualisée entre tous les acteurs. Dans ce cadre, l’ARS s’attache à construire un continuum de prise en charge à la fois sanitaire et médico-sociale des consommateurs, adapté à leur profil et centré sur leur parcours, de la rencontre initiale sur les lieux de consommation à l’inclusion sociale.

 

De l’aller-vers à la thérapie…

Les premiers intervenants de ce parcours sont les six équipes de maraudes organisées par plusieurs gestionnaires de CAARUD.

Ecoutez les témoignages de Guilhem Saisset, chef d’équipe mobile et Alexia Gillard, coordinatrice d’équipe mobile d’un centre d’accueil et d’accompagnement de réduction des risques pour les usagers de drogues (CAARUD) qui présentent les missions des CAARUD. 

Ces équipes mobiles vont à la rencontre des usagers dans une démarche de réduction des risques et des dommages (entretien d’aide et de soutien, distribution de matériel de réduction des risques, dépistage et prise en charge des maladies…). Ces maraudes ont pour but de créer du lien, d’aider à vivre et à améliorer la situation des personnes vivant à la rue. Elles permettent aussi de repérer des situations sanitaires et sociales individuelles urgentes. C’est le premier niveau ou la « porte d’entrée » du continuum de prise en charge sanitaire et social.

Retour en image sur le dispositif de maraude d’un CAARUD de l’Association Aurore, en présence d’une coordinatrice d’équipe mobile et d’un chef d’équipe mobile de l’association. Cette séquence met en lumière l’importance des maraudes pour maintenir un lien précieux avec les usagers en situation de grande précarité. La vidéo illustre le dispositif de maraude qui propose un accompagnement adapté et répond aux besoins immédiats de l’usager tout en ouvrant la voie vers une prise en charge plus globale. Dans ce contexte, "aller vers" prend tout son sens, incarnant une démarche proactive pour rencontrer les usagers là où ils se trouvent, et instaurer une relation de confiance indispensable.

Ces équipes sont aussi chargées d’orienter les consommateurs qui le souhaitent vers les trois espaces de repos parisiens (ouverts jour et nuit), ou vers les dispositifs sanitaires existants (consultations d’addictologie et de psychiatrie, en CSAPA ou en CMP, hôpital de jour d’addictologie, services d’urgence, équipes hospitalières mobiles…). 

Deux équipes mobiles hospitalières portées par l’hôpital Fernand Widal (AP-HP) et l’hôpital Sainte-Anne (GHU-PPN) apportent un soutien spécialisé (en addictologie et psychiatrie) aux maraudes de 1ère ligne avec une présence au plus près des usagers.

Les maraudes encouragent les personnes à rejoindre les parcours de soins disponibles en Île-de-France. Ces parcours incluent cinq unités d’hospitalisation en addictologie et des lits D2O (dispositif d’observation et d’orientation) pour les usagers de crack ayant des situations complexes, comme des troubles somatiques ou psychiatriques. Ces unités proposent une prise en charge adaptée aux besoins spécifiques des usagers en situation de précarité. Le dispositif D2O vise à être réactif, permettant un délai d’admission inférieur à 24 heures. Chaque jour, la personne hospitalisée bénéficie d’une évaluation addictologique, somatique et psychiatrique. À travers une prise en charge singulière et adaptée aux besoins des usagers, ces lieux d’hospitalisation réunissent les conditions les plus adaptées possibles pour permettre à l’usager de commencer à élaborer son parcours de soins. Ces usagers sont accompagnés par une équipe interdisciplinaire en leur donnant l’occasion de s’éloigner du produit et des lieux de consommation. 

Découvrez les témoignages des professionnels de santé impliqués dans le dispositif d’observation et d’orientation pour les consommateurs de crack (D2O) de l’hôpital Sainte-Anne. Ils partagent leur expérience sur le rôle central de ce dispositif, qui repose sur une coordination étroite entre différents types de professionnels mobilisés pour cette prise en charge. Ces témoignages mettent également en lumière un moment décisif dans le parcours d’un usager de crack : celui où l’usager exprime le souhait d’entamer un parcours de soins, marquant une étape clé vers l’arrêt de sa consommation.

… puis à l’hébergement…

L’ARS Île-de-France participe activement aux dispositifs d’hébergement accompagné instaurés par la Préfecture d’Île-de-France, notamment à travers le programme ASSORE, qui regroupe 69 sites dans la région. L’accompagnement médico-social proposé par l’Agence régionale de santé Île-de-France permet aux usagers de sortir de la vie à la rue et de s’inscrire dans un parcours de soins. Par ailleurs, des appartements thérapeutiques constituent un dispositif renforcé d’hébergement accompagné, destiné aux personnes en phase de stabilisation.

… et du temps et différentes structures d’accueils pour mieux se reconstruire

Enfin, fin 2022, pour élargir l’offre permettant de consolider le sevrage et le rétablissement de la personne, l’ARS a mis en place un dispositif d’orientation et d’accueil hors Île-de-France des consommateurs de crack en structures de soins addictologiques résidentiels. L’objectif de ce programme est de proposer aux usagers préalablement pris en charge dans l’un des dispositifs franciliens d’entrer dans un des centres de soins résidentiels éloignés de Paris permettant ainsi une rupture avec ses habitudes de vie et de consommation. Pour y parvenir, plus de 50 établissements dans 12 régions travaillent en étroite collaboration avec l’ARS Île-de-France pour fluidifier et adapter l’accueil de ces personnes. La typologie variée de ces établissements permet de développer l’offre de soins et d’accompagnement : 

  • Centre Thérapeutique Résidentiel,
  • Communautés Thérapeutiques, 
  • Soins médicaux et de réadaptation, 
  • Appartement thérapeutique, famille d’accueil thérapeutique.  

Pour accompagner les établissements dans cette démarche, des journées d’études, des réunions d’intervisions et journées d’échanges de pratiques sont organisées tout au long de l’année à l’échelle nationale. En janvier 2025, 166 orientations vers des soins résidentiels en région ont été réalisées. 

Focus sur la communauté thérapeutique : un lieu d’accueil pour des personnes en situation d'addiction engagées dans une démarche d'abstinence. Avec Gilles Sibilli, éducateur spécialisé au sein de la communauté thérapeutique de Barsac (CEID) en Gironde (33).

Les communautés thérapeutiques sont des espaces dédiés au travail sur la personne. Au sein de ces structures, la prise en charge, d'une durée de 24 mois, s’appuie sur un collectif et repose sur un accompagnement pluridisciplinaire incluant un assistant social, des éducateurs, un psychologue, un médecin et des infirmiers. 

Retrouvez le témoignage de Ludovic, ancien usager de crack, hébergé dans la communauté thérapeutique de Barsac, en Gironde.

Son parcours met en lumière les différentes étapes d’un cheminement complexe : de l’arrivée dans la dépendance à la sortie de l’addiction. Ce récit illustre à la fois les défis et les conditions nécessaires pour s’en sortir, grâce à un accompagnement structuré : maraudes, demande d’arrêt, sevrage, et éloignement des lieux de consommation.

Ce témoignage est aussi l’occasion de souligner l’importance d’un dispositif complet et d’un soutien humain à chaque étape du processus.