Contrôle sanitaire des pesticides en Île-de-France dans les eaux destinées à la consommation humaine

Article

À travers le monde, il existe plus de 1000 pesticides différents plus les métabolites qui en découlent dont environ 300 substances actives autorisées en France. Ainsi, le contrôle sanitaire des eaux mis en œuvre en Île-de-France inclut les pesticides depuis les années 80.

Aujourd’hui, plus de 200 molécules (dont certaines ayant vu leur autorisation retirée mais persistant dans l’environnement) sont suivies et ont été choisies en fonction notamment des données de plusieurs réseaux de surveillance, de la connaissance des risques sanitaires, des données de ventes de molécules de pesticides en Île-de-France et des capacités analytiques des laboratoires agréés en charge du contrôle sanitaire des eaux franciliennes.

Cette liste est amenée à évoluer pour s’adapter aux connaissances scientifiques en constante évolution et au contexte réglementaire. A titre d’exemple, la liste francilienne des pesticides et métabolites recherchés dans le contrôle sanitaire a évolué en 2022 pour passer d’environ 140 molécules à plus de 200 molécules et s’est également vue étoffée au 1er janvier 2025.

Retrouvez les résultats des contrôles sanitaires

Les critères de qualité pour les pesticides

Les pesticides et leurs métabolites pertinents sont soumis à des limites de qualité réglementaires dans les eaux distribuées de 0,1 µg/litre - à l’exception de l’aldrine, la dieldrine, l’heptachlore, l’heptachlorépoxyde pour lesquelles une limite de qualité à 0,03 µg/L est fixée - par substance et 0,5 µg/litre pour la totalité des substances recherchées.

Les métabolites non pertinents ne sont pas soumis à la limite de qualité de 0,1 µg/l, et ne sont pas inclus dans le paramètre somme des pesticides. Ils sont soumis au respect de la valeur indicative de 0,9 µg/l. 

Les mesures de gestion en cas de dépassement

Lorsque l’exigence de qualité n’est pas respectée, ponctuellement ou plus régulièrement dans le temps, le responsable de la distribution de l’eau est tenu :

  • de prendre des mesures appropriées et d’informer les consommateurs,

  • de mettre en œuvre un programme d’amélioration pour rétablir la qualité des eaux distribuées.

S’agissant des pesticides et métabolites de pesticides pertinents dans les eaux destinées à la consommation humaine, tout dépassement de la limite de qualité de 0,1 µg/l est comparé à une valeur sanitaire maximale (Vmax), propre à chaque molécule et établie par l'ANSES, en deçà de laquelle l'eau peut être consommée sans entraîner d'effet néfaste pour la santé.

S’agissant des métabolites non pertinents, en cas de dépassement de la valeur indicative de 0,9 µg/l, l’eau peut continuer à être consommée, mais la collectivité est invitée à mener des actions correctives proportionnées aux enjeux locaux. 

Quels sont les risques pour la santé ?

Les effets sur la santé des pesticides sont surtout connus dans le cas d’intoxications professionnelles suite à l’exposition accidentelle à un produit concentré. À de très fortes doses, l’intoxication dite ‘‘aiguë’’ se manifeste par des troubles nerveux, digestifs, respiratoires, cardio-vasculaires ou musculaires. 

La connaissance des effets d’une exposition à de très faibles doses de pesticides et à long terme est encore aujourd’hui incomplète (notamment les effets associés à un cocktail de molécules). Certains sont suspectés d’être cancérigènes, voire mutagènes, et d’entraîner des effets néfastes sur le système nerveux central (Parkinson) et le foie. Certains sont également considérés comme des perturbateurs endocriniens. 

L’eau ne constitue pas le seul apport de pesticides : sauf exception, la part attribuable à l’eau est très inférieure à celle présente dans les aliments. Des résidus de pesticides sont également présents dans l’alimentation (fruits, légumes, céréales et produits céréaliers) et dans l’air.

La gestion du risque sanitaire s’appuie sur les recommandations émises par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) qui prend en compte les différentes voies d’exposition pour déterminer les valeurs de gestion sanitaire pour l’ensemble de la population.

Les mesures de préservation de la ressource en eau et les traitements des eaux brutes

Les solutions pour garantir une bonne qualité de l’eau distribuée vis-à-vis des pesticides : allier préventif et curatif.

La protection des captages et la préservation de la ressource

Les solutions les plus pertinentes sur le long terme sont sans aucun doute celles qui visent à agir à la source du problème, c'est-à-dire les actions de réduction de l’utilisation des pesticides. Inscrites dans les objectifs du plan Ecophyto, ces dernières doivent tout particulièrement être mises en œuvre dans les aires d’alimentation des captages.

La mise en œuvre de traitements de l’eau

Les techniques de traitement adaptées à l’élimination des pesticides sont celles permettant leur rétention physique : adsorption sur filtre à charbon actif ou filtration membranaire. Il est à noter que l’efficacité de ces différentes techniques de traitement est fortement liée à la nature des molécules à éliminer et de l’eau à traiter. Les métabolites de pesticides, étant particulièrement petits et solubles nécessitent un renforcement des étapes de traitement.

La campagne exploratoire francilienne de 2024

L’Agence régionale de santé Île-de-France a mené en 2024 une campagne exploratoire portant sur 13 métabolites de pesticides, jusqu’alors non intégrés au contrôle sanitaire des eaux de consommation. L’objectif était de mieux appréhender la situation francilienne en matière de contamination des eaux par ces substances.

Des prélèvements et analyses ont été effectués au minimum une fois par trimestre en sortie d’usine de traitement de l’eau, par le laboratoire agréé en charge du contrôle sanitaire régional. Au total, plus de 1 200 analyses ont été réalisées sur 395 installations franciliennes au cours de l’année 2024.

Des dépassements des seuils réglementaires ont été constatés dans l’ensemble des départements franciliens, avec une prévalence plus marquée en grande couronne. Les dépassements concernaient principalement trois métabolites pertinents (la desphényl-chloridazone, la méthyl-desphényl-chloridazone et le chlorothalonil R417888), ainsi que deux métabolites non pertinents (le chlorothalonil R471811 et le dimétachlore R354742).

À la suite de ces résultats, l’ARS Île-de-France a contacté les collectivités concernées afin de les informer et de les accompagner, ainsi que leurs délégataires, dans la mise en œuvre de solutions visant à améliorer la qualité de l’eau distribuée.

Depuis le 1er janvier 2025, les 13 métabolites investigués dans le cadre de cette campagne ont été intégrés au contrôle sanitaire réglementaire de l’eau.

La cartographie ci-dessous présente les résultats de la campagne et localise les situations de dépassement observées.

Accéder à la cartographie
https://santegraphie.fr/mviewer/?config=apps/PESTICIDES.xml#