L’antibiorésistance : sensibiliser sur le bon usage des antibiotiques

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L'antibiorésistance est la capacité d'une bactérie à résister à l'action d'un antibiotique. Alors que la France est l‘un des pays les plus gros consommateurs d'antibiotiques, l'antibiorésistance peut être diminuée grâce au bon usage des antibiotiques et à la prévention des infections qui repose sur des mesures d'hygiène et la vaccination.

Qu’est-ce qu’un antibiotique ? 

Les antibiotiques sont des médicaments délivrés sur prescription médicale. Apparus en 1928, les antibiotiques ont permis de soigner les infections bactériennes et de sauver la vie de millions de personnes, en réduisant la mortalité par maladies infectieuses. 

Les antibiotiques sont efficaces uniquement sur les bactéries, ils agissent en les tuant ou en empêchant leur multiplication. Les antibiotiques n'ont aucun effet sur les virus et ne permettent pas de diminuer la durée des symptômes chez le patient. 

Antibiorésistance : de quoi parle-t-on ? 

L’antibiorésistance est le phénomène qui consiste, pour une bactérie, à devenir résistante aux antibiotiques. Les bactéries évoluent et développent des mécanismes de défense qui leur permettent d’échapper à leur action. Le développement de la résistance aux antibiotiques s'est fortement accéléré par l'utilisation massive et répétée des antibiotiques. 

Un antibiotique mal utilisé, c'est à dire pris à tort ou dont les doses et la durée du traitement n'ont pas été respectées, favorise l'apparition de bactéries résistantes. De plus, lorsqu'une bactérie devient résistante, elle transmet cette résistance à sa descendance. Cependant, cette situation est réversible sur le long terme si les prescriptions et les consommations diminuent. 

La solution : mieux utiliser les antibiotiques 

  • Se faire vacciner : être à jour sur sa vaccination évite des maladies graves et limite la prescription d’antibiotiques. 
  • Faire confiance à son professionnel de santé : il me prescrit des antibiotiques uniquement si nécessaire. 
  • Respecter les doses prescrites et la durée du traitement : bien utiliser les antibiotiques permet de préserver leur efficacité. Quand j'ai fini mon traitement, je ramène les antibiotiques restants à mon pharmacien et je ne les utilise pas à une autre occasion. 

La lutte contre l'émergence de l’antibiorésistance, une priorité pour la santé publique 

Chaque année en Europe, 35 000 personnes meurent d'une infection résistante aux antibiotiques. La France a conçu sa stratégie nationale 2022-2025 de prévention des infections et de l'antibiorésistance autour de deux piliers complémentaires : 

  • la prévention et le contrôle des infections (vaccinations, mesures barrières, hygiène et désinfection des mains) 
  • le bon usage des antibiotiques (le bon antibiotique, à la bonne personne, au bon moment). 

L’objectif du bon usage est de réduire la consommation des antibiotiques, qui est la première cause d’émergence de résistance bactérienne par pression de sélection, notamment dans le microbiote. 

L’Agence régionale de santé Île-de-France pilote la mise en œuvre de la lutte contre l’antibiorésistance dans la région. Pour cela, elle s’appuie sur un comité de pilotage transversal associant : le Centre régional en antibiothérapie (CRAtb), Le Centre régional d'appui pour la prévention des infections associées aux soins (CPias), l’Observatoire du médicament, des dispositifs médicaux et des innovations thérapeutiques (Omedit), les conseils de l’Ordre, les Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), Santé publique France, l’Assurance maladie, les URPS, des représentants des infectiologues, des hygiénistes et des médecins coordonnateurs d’EHPAD et les usagers. 

L’Île-de-France, 5ème région plus grosse consommatrice d’antibiotiques 

Malgré les progrès accomplis, la France reste l’un des plus gros prescripteurs d’antibiotiques. En 2021, en Île-de-France, la consommation est de 5% supérieure à la moyenne nationale. La résistance bactérienne est également supérieure en Île-de-France.  

Les équipes multidisciplinaires en antibiothérapie (EMA) pour une approche territoriale en réseaux 

  • Près de 90% des antibiothérapies sont initiées en ville et lors des consultations (1 consultation sur 6) en médecine générale. 
  • 70% des antibiotiques prescrits en ville le sont pour des infections respiratoires (hautes et basses) et 40% de ces prescriptions seraient inappropriées (source

Face à ces constats, l’utilisation raisonnée des antibiotiques s’impose. 

  • L’outil en ligne d'assistance à l'antibiothérapie Antibioclic est promu depuis plusieurs années auprès des médecins de ville franciliens. 
  • En période de tension d’approvisionnement, le mémo d’aide à la prescription antibiotique du CRAtb (Memo-Atb-rupture-amoxicilline-du-CRAtb-Île-de-France) est un outil précieux pour favoriser la pertinence des prescriptions. 

Le renforcement d’équipes multidisciplinaires en antibiothérapie (EMA) va permettre de structurer territorialement la lutte contre l’antibiorésistance. Ces équipes regroupent des personnels hospitaliers, dont a minima un infectiologue, un pharmacien, un microbiologiste et un infirmier formé en infectiologie. Leurs missions sont notamment de : 

  • contribuer à l’information et la formation des acteurs du bon usage des antibiotiques 
  • proposer une aide à la prescription d’anti-infectieux pour les cas complexes 
  • définir, en lien étroit avec les acteurs concernés, des plans d’action annuels de stratégie du bon usage des antibiotiques dans les établissements, les EHPAD ou la médecine de ville. 

A l’issue d’appels à candidatures régionaux, 12 premières EMA franciliennes sont subventionnées depuis 2023 par l’ARS pour une couverture progressive du territoire : GHT St Denis Delafontaine (93)/Gonesse (95), Henri Mondor à Créteil (94) ; St Louis-Lariboisière (75), EMA2B (Bichat/Beaujon 75/92), Hôpital Saint-Joseph/Marie Lannelongue (75/92), Argenteuil (95), CHI Villeneuve Saint-George (94), Centre hospitalier Sud Francilien (91), Melun/fontainebleau (77) et Avicenne (93) mais aussi  2 EMA pédiatriques basées à l’hôpital Robert Debré, et Trousseau/CHIV (75/94), les enfants, et en particularité les 0-4 ans, étant la population la plus consommatrice d’antibiotiques. 

Pilotage de la lutte contre l'antibiorésistance à l’hôpital : des référents antibiotiques et une astreinte d’infectiologie 

Dans le secteur hospitalier, le rôle des référents en antibiothérapie est majeur pour le pilotage de la lutte contre l’antibiorésistance par la diffusion des bonnes pratiques et le conseil. 

Sous l’impulsion de l’ARS et de la collégiale des infectiologues d’Île-de-France, une astreinte francilienne d’infectiologie (AFI), désormais coordonnée par le CRAtb, a été mise en place en 2016 en établissements de santé (numéro unique 01 46 61 15 00). Des infectiologues séniors volontaires de toute l’Île-de-France participent à cette astreinte régionale dans le cadre de la permanence des soins. Elle prend le relais des référents la nuit, les week-ends et les jours fériés pour aider leurs confrères hospitaliers pour les avis infectieux complexes et urgents, principalement pour les antibiothérapies complexes ou en cas de Bactéries multi-résistantes (BMR). 

Pour préserver les antibiotiques, l'ARS et ses partenaires déploient l’approche "une seule santé" ! 

Tout le monde a un rôle à jouer dans la lutte contre le phénomène silencieux de l’antibiorésistance. Pour orchestrer la politique régionale, l’ARS organise un « comité de pilotage régional de lutte contre l’antibiorésistance » associant ARS, Assurance maladie, collégiale des infectiologues d’Île-de-France, avec représentation de tous les acteurs et tous les secteurs de soins. Les structures d’appui franciliennes (Omedit, CRAtb et CPias) mettent leur expertise au service des professionnels et des usagers. L’implication du patient et la coordination des acteurs sont essentielles. Il s’agit pour l’ARS Île-de-France d’aider les acteurs du soin médecins, pharmaciens et les patients à engager des conversations et notamment sur l’utilisation excessive des antibiotiques. La réduction de la durée de traitement antibiotique au minimum nécessaire et le choix d’antibiotiques moins pourvoyeurs de résistances sont essentielles pour limiter l’exposition et lutter contre les résistances bactériennes (recommandations de la HAS).  Renforcer l’engagement contre la résistance aux antibiotiques, en favorisant l’approche « Une seule santé », est un nouveau tournant dans une démarche pluridisciplinaire en prônant le principe d’utilisation prudente et responsable des antibiotiques et les mesures de prévention et de contrôle des infections dans tous les secteurs.