Périnatalité et santé du jeune enfant : stratégie et dispositifs en Ile-de-France

Les enjeux de la périnatalité en Ile-de-France

Dans le champ de la périnatalité et de la petite enfance, la région Île-de-France se caractérise par des indicateurs de mortalité et de morbidité moins favorables que les moyennes nationales : surmortalité infantile, périnatale et maternelle, plus grande fréquence des naissances prématurées, plus fort taux de prévalence de l’obésité infantile, par exemple.

L’Île-de-France se caractérise également par d’importantes disparités territoriales en termes d’indicateurs de santé périnatale et infantile, corrélés avec le poids des déterminants, individuels, sociaux, environnementaux, et la prévalence des comorbidités (obésité, diabète, etc.), elles-mêmes liées aux déterminants sociaux. 

Les travaux réalisés en Seine-Saint-Denis dans le cadre du programme RéMI ont confirmé l’interaction de la précarité sociale avec l’organisation et la qualité des soins (qualité des soins non optimale, orientations et suivis inadéquats, précarité non prise en compte ou non accompagnée, etc.).

L’offre de soins en périnatalité et petite enfance est inégalement répartie sur le territoire francilien, concentrée sur Paris et certaines zones de la petite couronne (92), et plus difficilement accessible en grande couronne (77, 91, 95) et l’accès des populations à une prise en charge adaptée à leurs besoins reste une préoccupation, notamment dans les situations médicales ou sociales complexes.

Les femmes enceintes ne bénéficient pas systématiquement d’un repérage précoce et efficient des situations de vulnérabilité, qui permettrait une orientation vers le parcours le plus adapté à leurs besoins, et la mobilisation pertinente des ressources. 

La coordination des acteurs (ville-hôpital, santé-social) et la prise en compte des déterminants sociaux, notamment de la précarité et de ses conséquences, des besoins d’accompagnement en médiation ou interprétariat, sont encore insuffisamment développés.

La démographie des professions intervenant spécifiquement dans le champ de la périnatalité et de la santé de l’enfant est contrastée. L’Île-de-France se caractérise par d’importantes disparités entre départements (Paris et Hauts -de-Seine sont les mieux dotés, à l’inverse la Seine-et-Marne cumule densités faibles et professionnels plus âgés.)

Des perspectives ont certes été ouvertes par l’évolution des métiers, les protocoles de délégation de tâches, le développement des coopérations entre professionnels, la mise en place de protocoles de gradation des soins entre médecins généralistes et pédiatres, le développement du recours aux nouvelles technologies mais la situation reste compliquée. 

Depuis quelques années, la région est confrontée à des problématiques et phénomènes de réductions de capacité de l’offre de soins en périnatalité dû notamment aux tensions sur les ressources humaines dans la filière de la périnatalité. Pour y répondre, l’ARS Ile-de-France a mis en place un plan de gestion régional spécifique.

La stratégie régionale en matière de périnatalité

L’Agence a engagé une stratégie régionale en lien avec les acteurs de la périnatalité et du jeune enfant présents sur le territoire à travers un ensemble de programmes menés en région. 

Ils ont pour objectifs de :

• améliorer le suivi et la connaissance des déterminants de la santé périnatale
• favoriser un maillage territorial permettant l’accès à la prévention et à des soins gradués sur l’ensemble du territoire
• améliorer la coordination des parcours complexes en périnatalité et santé du jeune enfant afin d’apporter une réponse adaptée face aux vulnérabilités d’ordre médical, social ou psychologique que cumulent certaines familles
• améliorer la pertinence des soins et garantir la qualité et la sécurité des prises en charge afin de diminuer la morbi-mortalité maternelle et infantile

Les programmes portés en Ile-de-France autour de la périnatalité et de la santé du jeune enfant

Programme régional de réduction de la mortalité infantile (RéMI)

L’Agence a lancé depuis 2012 un programme régional autour de la réduction de la mortalité infantile, plus spécifiquement concentré sur le territoire de la Seine-Saint-Denis. Il vise à mieux suivre les données autour de la mortinatalité, leurs déterminants et réduire les facteurs de risque.

Programmes autour de la santé en périnatalité

SOS Allaitement en Ile-de-France

L’Agence et la Direction générale de la Santé ont appuyé le lancement, par les septs réseaux de santé en périnatalité (RSP) franciliens, d’un numéro vert (0 800 800 315) à destination des jeunes parents en cas de difficultés avec l’allaitement.

Ces familles peuvent joindre des professionnels de santé formés en cas d’indisponibilité du professionnel de santé qui les suit pour bénéficier d’un appui (conseils et orientations) adaptés à leurs besoins.

Généralisation de l’entretien prénatal précoce

L’entretien prénatal précoce proposé au 4ème mois est une étape cruciale dans le parcours de grossesse et un outil de prévention en matière de santé mentale. Il permet de recueillir les besoins d’accompagnement et de soutien des parents, détecter les risques médico-psycho-sociaux.

Rendu obligatoire en mai 2020 dans le parcours de grossesse et faisant partie des priorités nationales dans le cadre des 1 000 premiers jours, l’objectif national est d’atteindre 70% de taux de réalisation fin 2022. En 2019, le taux estimé en Ile-de-France était de 37% avec des disparités départementales importantes. L’Agence a engagé des actions pour renforcer et assurer sa généralisation. Une démarche de contractualisation avec les réseaux de santé en périnatalité et les acteurs de la PMI a été menée au travers notamment des CPOM 2021-2024. Des actions de formation des professionnels sont réalisées. 

Santé mentale en périnatalité

Repérage des difficultés et orientation des parents lors des séjours à la maternité

Pour renforcer le repérage et la prise en charge des risques psycho-pathologiques en périnatalité,  l’Agence a défini des actions prioritaires dont : 

Le repérage chez la femme enceinte, la mère et co-parent ou le bébé, en lien notamment avec 

• la promotion de l’entretien prénatal précoce ;
• la promotion de l’entretien post-natal précoce (à partir de juillet 2022) ; 
• le repérage de la dépression du post-partum par l’utilisation de l’échelle de dépression postnatale d'Edimbourg (EPDS).

Le renforcement des staffs médico-psycho-sociaux

L’Agence a lancé en début d’année une campagne de financement au sein des maternités franciliennes pour renforcer l’appui aux staffs médico-psycho sociaux et développer un cadre de travail pluri-professionnel, pluri-partenarial et coordonné en région autour d’une charte régionale. Les staffs médico-psycho-sociaux ont vocation à organiser une prise en charge pluridisciplinaire autour des situations de vulnérabilités dès la grossesse. Ils visent à évaluer et mettre en oeuvre un accompagnement adapté dans le champs médical, psychologique et social pendant la durée de la grossesse et de la période post-natale notamment en organisant le relai avec les acteurs de ville et notamment les services de protection maternelle et infantile (PMI)

Renforcement de l’offre par territoire

L’Agence a acté le principe de la généralisation des unités de psychopathologie périnatale pour 100% des maternités franciliennes. Chaque maternité francilienne devra contractualiser avec une unité de psychopathologie périnatale.

Dans le cadre des projet territoriaux de santé mentale, le diagnostic sur les besoins et l’offre de soins en santé dans le champs de la périnatalité ont pu être exposés et ont conduit à élaborer des actions spécifiques dans le champs de périnatalité et d’autres plus transversales qui pourront appuyer les équipes.

Dans le cadre de l’appel à projet 2021 national visant à renforcer l’offre de psychiatrie périnatale, 3 projets ont été retenus en Ile de France : 

• La création d’une unité de soins conjoints parents-bébés à temps plein porté par le CH de Saint-Denis (93)
• La création d’un centre de Ressources et de soins en psychiatrie périnatale porté par l’établissement public de santé Erasme Fondation Vallée (92)
• La création d’une unité d’hospitalisation de jour en psychiatrie périnatale porté par l’ établissement public de santé Barthélémy Durand (91)

Programmes autour de la santé du jeune enfant 

Programme de détection de la surdité totale infantile

L’Agence, en lien avec la Coordination Francilienne du Dépistage Néonatal de l’Audition (CFDNA) et les réseaux de santé en périnatalité, mène un programme régional pour renforcer la détection de la surdité permanente néonatale via un parcours composé d’examens et d’information aux jeunes parents.

En savoir plus sur le programme de dépistage de la surdité néonatale

Programme de suivi des enfants vulnérables

Le programme régional de suivi des enfants vulnérables (SEV) a été initié en 2005 par le réseau pédiatrique du sud-ouest francilien (RPSOF) et généralisé à l’ensemble de la région depuis 2015.  

Il est mis en œuvre par les réseaux de santé périnatale, et piloté par l’ARS Ile-de-France.

Il s’adresse à un public de nouveau-nés très prématurés, grands hypotrophes ou atteints de pathologies périnatales sévères (asphyxie périnatale et autres pathologies susceptibles d’altérer le développement).

Il propose un suivi de l’enfant pendant les 7 premières années de vie et un accompagnement des familles.

En savoir plus sur le programme de suivi des enfants vulnérables

Programme d’accès aux soins des publics fragiles

L’Agence mène un programme de travail pour développer une offre territoriale permettant une gradation des réponses proposées au regard des besoins identifiés. Ce programme s’inscrit notamment au travers de la mesure 27 du Ségur de la Santé, il prévoit :

• Un premier niveau d’intervention via la mise en place d’hébergement d’urgence avec mobilisation des structures de droit commun ; 
• Un second niveau de réponse via la mobilisation d’une équipe d’accompagnement médico-social en structure d’hébergement, en hébergement hôtelier ou en habitat précaire. 
  Dans le cadre de la mesure 27 du Ségur de la santé, l’Agence a lancé le financement et le déploiement d’équipes mobiles médico-sociales en Ile-de-France. Parmi les 46 équipes retenues, 3 interviennent dans le champ de la périnatalité :
  • un Lit Halte Soin Santé mobile (LHSS mobile) périnatalité porté par le groupe SOS Solidarité (93 ; une partie du 95 et du 77) ;
  • un LHSS mobile périnatalité porté par l’association Aurore (91 ; 94) ;
  • une équipe mobile santé précarité (EMSP) périnatalité portée par l’association Basiliade (75 ; 92). 
• Un troisième niveau de réponse a été apporté aux situations les plus complexes via le HSR d’Athis Mons.

Créé en mars 2021, le dispositif innovant d’hébergement et de soins résidentiels (HSR) Confluence porté par l’association Aurore, à vocation régionale, et implanté à Athis Mons (91) offre une prise en charge des cas les plus complexes.

Ce dispositif comprend des places de LHSS pour des femmes enceintes, des places de LHSS pour des couples mères-bébés, des places d’ACT et des places d’hébergement d’urgence pour des accompagnants (conjoints ou enfants). 

L’ensemble de ces dispositifs médico-sociaux viennent compléter la stratégie de renforcement du nombre de places d’hébergement d’urgence (HU) pour les femmes enceintes et sortant de maternité sur le territoire francilien, ainsi que pour leurs accompagnants porté par la DRHIL en Ile-de-France.

Programmes autour des parcours innovants en périnatalité

Dispositif expérimental référent parcours périnatalité (RéPAP)

Un dispositif expérimental autour du référent parcours périnatalité a été lancé dans le cadre de l’article 51 de la LFSS en avril 2022 Ce dispositif porté par la Direction générale de la santé et soutenu par l’ARS Île-de-France, est déployé par la CPTS Centre-Essonne et le réseau périnatal Périnatif Sud. Il s'inscrit dans la feuille de route des 1000 premiers jours. Il permet de proposer aux femmes enceintes, au-delà du suivi prénatal et postnatal habituel, un accompagnement personnalisé et gradué par un référent parcours périnatalité (RéPAP).

En plus des quatre entretiens prévus (deux pendant la grossesse et deux après l’accouchement), le RéPAP sera disponible par téléphone pour répondre aux questions et rassurer tout au long de la grossesse et jusqu’aux trois mois de l’enfant. Cet accompagnement s’intègre dans un forfait de prise en charge à 100% par l’Assurance maladie.  

17 RéPAP sont d’ores et déjà engagés dans le dispositif. Ils seront en lien avec les 3 maternités du territoire (Centre Hospitalier Sud Francilien, la clinique du Mousseau-CMCO et Hôpital Privé D’Evry), la PMI du 91 et l’ensemble des professionnels du territoire de la CPTS.

Le programme régional de gestion des tensions en maternité en Ile-de-France

La région Ile-de-France connaît actuellement des tensions sur les ressources humaines en périnatalité. Elles sont particulièrement importantes au sein des établissements de santé (Service de gynécologie-Obstétrique et services de néonatalogie). Ces tensions concernent toute la région mais sont plus marquées sur certains territoires de la région. Elles engendrent des réductions de capacité de l’offre de soins en périnatalité : baisse du nombre de lits d’hospitalisations (maternité et néonatalogie), réduction de la capacité d’inscription pour les accouchements, réduction de l’offre pour le suivi prénatal…

Face à cette situation, l’Agence régionale de santé déploie plusieurs mesures pour venir en appui aux maternités de la région et aux professionnels de la périnatalité afin de sécuriser les parcours de soins des femmes/couples et des nouveau-nés.

Mesure 1 : Mise en place d’une cellule d’appui régionale visant à faciliter l’orientation des femmes sur le point d’accoucher (ou qui viennent d’accoucher)

Cette cellule TATEPA peut être directement sollicitée par les établissements en tension et qui ne peuvent prendre en charge une femme sur le point d’accoucher, ou une femme qui ne peut être hospitalisée en suites de couches ;

Elle fonctionne sur la collaboration inter-établissement en partenariat avec les acteurs des transports sanitaires (SAMU, pompiers, ambulances…)

Elle est adossée à la cellule régionale de transferts in utero (déjà existante pour les grossesses pathologiques et portée par l’APHP - hôpital Béclère) et qui a été renforcée pour endosser cette nouvelle mission.

Cette cellule a été activée depuis le 4 juillet 2022 et pour toute la durée de l’été.

Mesure 2 : Mise en place d’une cellule régionale permettant de faciliter l’inscription des femmes non inscrites en maternité (refusées par manque de place) et/ou sans suivi de grossesse

L’Agence a mis en place une cellule d’aide à l’inscription en maternité (AIMA IDF)

Elle est accessible directement par les femmes enceintes soit en remplissant un formulaire AIMA en ligne soit par téléphone 01 44 02 00 70 pour assurer son accès au plus grand nombre.

Elle fonctionne avec la collaboration :

• inter-établissement pour l’inscription afin d’orienter les femmes vers des maternités ayant des places disponibles en tenant compte de leur situation.
• des professionnels de ville et des PMI pour le suivi de grossesse et post-partum
• des réseaux de santé en périnatalité et autres dispositifs d’appui à la coordination pour la diffusion de l’information et l’appui aux situations complexes.
• de l’ensemble des acteurs des territoires (communes associations,...) pour l’identification des femmes sans solution et pour l’orientation vers le dispositif ;
• de la CPAM pour l’information des femmes et des professionnels.

Cette cellule, portée par l'Agence, sera activée le 25 Juillet 2022

Mesure 3 : Mobilisation de tous les viviers de professionnels disponibles pour venir en renfort des établissements de santé

Cette mesure vise à garantir la sécurité pour les accouchements réalisés durant la période en Ile-de-France. Elle concerne :

• les nouveaux diplômés pour s’engager au sein des maternités dès la fin des études
• les sages-femmes libérales ou en PMI
• les professionnels (sages-femmes ou infirmier) récemment retraités 

Mesure 4 : Mise en place de médiation en santé en maternité auprès de 5 établissements pilotes 

Cette mesure vise à répondre à un double objectif :

• Accompagner des femmes enceintes/couples en difficulté pour se repérer dans le système de santé en périnatalité (lutte contre les inégalités sociales en santé)
• Améliorer la qualité de vie au travail des professionnels de santé en facilitant la coordination des parcours et en prenant en charge les questions administratives et sociales individuelles.

Mesure 5 : Définition d’un panier d’actions visant à améliorer l’attractivité des métiers de la périnatalité notamment au sein des établissements de santé.

Au travers de cette mesure, l’Agence s’engage à :

• Augmenter le nombre d’allocations études financées par l’Agence pour les étudiants sages-femmes et infirmiers
• Développer un appui administratif aux équipes médicales pour qu’elles puissent se centrer sur leurs champs de compétence : le soin
• Améliorer la qualité de vie au travail des professionnels en établissement de santé

Les acteurs et structures présentes en Ile-de-France dans le champ de la périnatalité

L’Agence travaille en lien étroit avec les acteurs engagés dans le champ de la périnatalité. Elle peut notamment s’appuyer sur les réseaux de santé en périnatalité qui regroupent des institutions (hôpitaux, centres de santé, centres de PMI, centres sociaux, centres médico-psychologiques, centres d'action médico-sociale précoce, associations d'usagers...) et des professionnels de santé ou du champ médico-social impliqués en périnatalité en Ile-de-France.

La Commission régionale périnatalité

Animée par les directions métiers de l’Agence, cette instance réunit les représentants de la communauté périnatale francilienne.

Les réseaux de santé en périnatalité

Les réseaux de santé en périnatalité deviennent dispositif spécifique régional (DSR) en périnatalité.
La région Ile-de-France est couverte par sept réseaux de santé en périnatalité territoriaux, un réseau de suivi des enfants vulnérables territorial (RPSOF) et trois réseaux régionaux thématiques.