Une enquête régionale sur les centres médico-psychologiques (CMP)

Actualité

En 2024, l’ARS Île-de-France a conduit une enquête régionale auprès des centres médico-psychologiques (CMP) pour adultes et pour enfants et adolescents du territoire. Objectif : mieux connaître les organisations de ces structures pivot dans les parcours de soins, leurs conditions d’accès, leurs besoins et spécificités territoriales et soutenir leur renforcement dans le cadre du PRS 2023-2028.

Acteur essentiel de la psychiatrie de secteur, les centres médico-psychologiques proposent une prise en charge spécialisée de proximité, favorisant le maintien des personnes dans leur milieu de vie. Avec près de 150 secteurs de psychiatrie de l’adulte et plus de 50 secteurs de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, l’Île-de-France compte environ 380 CMP, tous confrontés à une demande de soins en santé mentale en hausse et des ressources humaines en tension. 

Lancée en juin 2024, l’enquête a rencontré un très fort taux de participation : 94 % des CMP franciliens ont répondu, soit 348 structures (adultes et infanto-juvéniles), permettant d’obtenir un état des lieux détaillé de la situation régionale. Cette enquête régionale a fait l’objet d’une restitution en deux temps auprès des établissements de psychiatrie franciliens, ainsi que d’une communication orale lors du congrès 2025 de la société française de santé publique (thème : la santé mentale publique).

 

Une activité soutenue, des délais d’attente encore longs

En moyenne, un CMP adulte suit environ 1 000 patients par an pour environ 9 actes par patient et un CMP infanto-juvénile près de 400 mineurs, pour environ 11 actes par jeune patient, ce suivi incluant le lien avec la famille. Des disparités départementales sont constatées, et les structures rapportent également des difficultés à suivre leur activité, notamment logistiques ou informatiques.
Si les CMP déclarent des objectifs de délai d’attente compatibles avec une qualité des soins souhaitée, les délais effectifs restent trop importants, du fait des difficultés RH notamment médicales : entre 9% et 42% des structures adultes selon les départements ne parviennent pas à proposer de rdv médical sous 3 mois après enregistrement d’une nouvelle demande ; pour un rendez-vous avec un psychologue, les délais sont souvent prolongés. Pour les CMP de l’enfant et de l’adolescent, seuls 30% déclarent des délais inférieurs à trois mois, certains départements (77, 91, 93 et 95) témoignant de délais d’accès aux soins supérieurs à l’année. 

 

Des équipes engagées mais confrontées au manque de moyens

L’enquête met en évidence des vacances de postes importantes sur l’ensemble du territoire francilien, certains départements étant plus touchés (77, 78, 91, 93, 95). Pour autant, les équipes peuvent faire preuve d’une forte réactivité et d’une grande capacité d’adaptation, en particulier pour l’accueil des soins non programmés et la prise en charge des situations de crise : plusieurs établissements ont ainsi mis en place des dispositifs ou organisations dédiés (équipes mobiles, consultations spécialisées, créneaux dédiés…), au niveau du CMP ou à un niveau sectoriel voire intersectoriel.

L’enquête fait ressortir, parfois au détour de commentaires venant contextualiser certaines réponses, des disparités en matière d’équipement : si dans certains départements, l’équipement informatique du CMP permet un accès direct au dossier patient informatisé et un codage de l’activité, d’autres CMP, notamment infanto-juvéniles, ne sont pas encore informatisés. Des problématiques telles que l’accès facilité à un véhicule de service pour les visites à domicile, ou à du matériel pédagogique spécialisé, ressortent également.

 

Des conditions d’accueil variables selon les territoires

Si la quasi-totalité des CMP sont ouverts cinq jours par semaine, l’ouverture après 18h et/ou le week-end ne concerne un peu moins de deux tiers des CMP. Les visites à domicile, essentielles pour les patients les plus précaires, en situation d’isolement ou de perte d’autonomie sont encore très majoritairement proposées par les CMP adultes, même si le manque de personnel et parfois les problèmes matériels viennent en limiter la portée en volume et intensité. Concernant les CMP de l’enfant et de l’adolescent, celles-ci sont moins fréquemment proposées, et décidées au cas par cas.

 

Prévention et partenariats : des marges de progression

Les actions de déstigmatisation, de prévention et de dépistage restent globalement peu développées. Le suivi somatique est cependant assuré par plusieurs CMP, notamment autour des addictions et du syndrome métabolique. Les partenariats avec les médecins de premier recours (médecins généralistes, PMI, CPTS) apparaissent encore à consolider. Les partenariats avec les acteurs locaux des champs social (notamment CCAS, Education nationale pour les CMP de l’enfant et de l’adolescent) et médico-social (notamment SAVS, SAMSAH, liens avec les EHPAD pour les CMP de l’adulte) sont davantage développés, témoignant d’un ancrage local avéré des CMP.

 

Limites de l’étude

Si cette étude s’avère riche et permet une meilleure cartographie des CMP franciliens et de leurs organisations, les données remontées permettent d’avoir une vision de la situation à l’été 2024. Il conviendrait de reconduire l’enquête pour avoir des données actualisées et mieux appréhender l’évolution et l’adaptativité de ces organisations. De plus, cette enquête étant déclarative, elle est susceptible d’être affectée par un biais de désirabilité ou de méthodologie, bien que la description fine et qualitative de l’offre permette de mieux donner à voir l’activité des CMP. Enfin, les CMP interviennent sur des territoires différents, en taille mais également en caractéristiques socio-démographiques : ces différences, qui ont un impact majeur sur la demande de soins et l’organisation mise en place par le CMP, peuvent être difficilement objectivables sans des analyses croisées plus fines.

 

Des enseignements pour renforcer les CMP

Cette enquête constitue une base de données inédite sur l’organisation et les besoins des CMP franciliens. Elle met en évidence à la fois leur implication quotidienne dans l’accès aux soins psychiques de proximité, mais également les difficultés structurelles et les disparités territoriales auxquelles ils font face et les solutions mises en place par les équipes pour tenter d’y remédier.
Ces résultats et leur analyse permettront à l’ARS Île-de-France de mieux cibler les renforcements qui pourront être opérés, et d’accompagner les CMP les plus fragilisés, dans une logique de soutien territorial et d’amélioration de la qualité des prises en charge.

L'ARS Île-de-France a présenté les premiers résultats à l'occasion d'une série de webinaires organisés les 10 juillet, 23 septembre et 9 octobre 2025. Retrouvez les replays et présentations de ces webinaires