Soins Médicaux et de Réadaptation (SMR) en Île-de-France

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Les enjeux franciliens sont qualitatifs et s’articulent autour des 4 axes suivants : résolution des parcours bloqués ou complexes, montée en charge des prises en charge ambulatoire, développement des filières déficitaires et identification de filières oubliées, anticipation de l’impact des nouvelles technologies.

Bref rappel historique 

Le secteur des SMR, anciennement appelés SSR (Soins de Suite et de Réadaptation) a connu une évolution importante au fil des 20 dernières années. Historiquement, ce secteur était trop souvent considéré comme un secteur peu médicalisé et peu valorisé (« moyen séjour ; convalescence, maison de repos »). Cette image péjorative était renforcée par le terme de « soins de suite » insistant uniquement sur le rôle « d’aval » du secteur, après la phase aigüe (MCO). La réforme des SSR de 2008 a représenté un virage important, fusionnant les ex « soins de suite » et les soins de réadaptation en un seul secteur, à la médicalisation renforcée, les SSR, avec plusieurs mentions spécialisées selon les pathologies prises en charge (neurologie, locomoteur…).

Le secteur s’est considérablement développé du fait de plusieurs facteurs :

  • Le vieillissement de la population, et donc l’augmentation de pathologies liées à l’âge (AVC par exemple) et de la dépendance

  • L’amélioration de la prise en charge des affections aigues et des maladies chroniques qui s’accompagne d’un nombre plus élevé de personnes vivant avec un handicap

  • Les progrès de la médecine de réadaptation : initialement la rééducation reposait sur des concepts très empiriques, aujourd’hui les données scientifiques fondées sur la preuve permettent de proposer des modalités de prise en charge plus techniques et reposant sur des bases scientifiques solides.

  • Les progrès technologiques : réalité virtuelle, rééducation robotisée, exosquelettes, télé-réadaptation….

Globalement, l’enjeu principal du secteur des soins de suite et de réadaptation concerne l’amélioration et la fluidification des parcours des patients. Le secteur SSR ne se résume pas à être « l’aval du secteur MCO ». Il a également vocation à être la face hospitalière de la prise en charge du handicap, proposant un processus global d’accompagnement incluant des soins de rééducation et de réadaptation personnalisés dans un objectif fonctionnel.

La réforme mise en œuvre en 2024 a remplacé le terme de SSR par celui de SMR pour insister sur la médicalisation de cette offre de soins.

Offre de soins SMR en Île-de-France

L’Ile de France bénéficie historiquement d’une offre SMR riche (deuxième région la plus dense en offre de soins SMR après la région PACA) et avec un haut niveau de spécialisation. Il existe à ce jour 223 établissements SMR franciliens, pour un capacitaire total estimé (en 2024) de   13 584 lits (Hospitalisation complète, HC) et 4 288 places (Hopital de jour, HJ) (hors sites extra-franciliens de l’AP-HP)

La répartition selon les statuts est la suivante :

  • Privé Lucratif : 40%

  • Etablissements de Santé Privés d’Intérêt Collectif (ESPIC, secteur privé à but non lucratif) : 20%

  • Etablissements Publics de santé hors AP-HP : 20%

  • Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) : 20%

Type de mentions :

En hospitalisation complète, le SMR gériatrique représente 42% de l’offre, la MPR (SMR locomoteur et neurologique) près de 30%, le SMR polyvalent près de 20%, le reste étant réparti entre les autres mentions (la pédiatrie représente environ 3% de l’offre).

En revanche, en hôpital de jour, la part du SMR gériatrique est plus faible (16%) et celle de la MPR plus élevée (60% environ).

Pour aller plus loin : 

Les enjeux du PRS-2 dans le secteur SMR étaient les suivants :

  • La résolution des parcours bloqués ou complexes ;

  • La montée en charge et le développement des prises en charge ambulatoires;

  • Le développement des filières déficitaires et la reconversion des filières excédentaires ;

  • L’identification de filières « oubliées » ;

  • L’anticipation de l’impact des nouvelles technologies et leur promotion.

Plusieurs de ces objectifs ont été atteints, au moins en partie :

  • Parcours complexes ou bloqués :

    • Création de 5 Unités de Soins Prolongés Complexes (USPC) (à l’AP-HP (hôpital Sainte Périne et hôpital Albert Chenevier, à l’hôpital du Vésinet, au centre de réadaptation UGECAM de Coubert, et au centre FSEF de Neufmoutiers en Brie (pour les personnes de moins de 35 ans)) et ouverture prévue de 3 nouveaux Services de Réadaptation post Réanimation (SRPR) neurologique (hôpital de Saint Denis, hôpital de la Salpétrière, et hôpital Forcilles) qui viennent renforcer l’offre existante (3 SRPR respiratoire, à Forcilles, la Pitié et Bligny) et 4 SRPR neurologique (Bicètre, Raymond Poincaré, Beaumont/Oise, Sainte Anne

    • Création des Cellules d’Aide à la Résolution des Situations Complexes (CARSIC), en subsidiarité des dispositifs et cellules cas complexes existantes pour aider les établissements à trouver des solutions pour les patients dont l’état médical ne nécessite plus une hospitalisation mais qui sont sans solution de sortie

  • Virage ambulatoire : Entre 2018 et 2022, 39 nouvelles implantations SMR en HJ

  • Développement de l’offre en HC: 12 nouvelles implantations dont 4 en SMR digestif, 2 en SMR respiratoire, gériatrie, addictologie.

  • Autorisation du projet article 51 « filières oubliées »: sur la prise en charge de la commotion cérébrale (traumatisme cranio-cérébral léger)

  • Appel à projet innovation numérique et SSR

La période a cependant été troublée par la crise sanitaire COVID-19, qui a touché le secteur SSR, mais qui a aussi permis plusieurs avancées :

  • La prise de conscience de l’importance des SRPR en aval de la réanimation

  • Le développement des outils de télé-réadaptation

  • Le développement d’une offre SSR « Covid-long » (24 sites en IdF suite à un AMI).
     

La priorité va être de mettre en conformité l’offre avec la réforme des autorisations, transformant le champ SSR en SMR (Soins Médicaux et de Réadaptation).

Certaines activités spécifiques non identifiées dans la réforme SMR mais répondant à un besoin devront être travaillées avec les partenaires, par ex :

  • Les SMR basse vision, néphrologie-dialyse, dénutrition sévère, périnatalité (SMR mère-enfant) : Il s’agit d’activités déjà existantes dans la région, mais non identifiées par des Activités d’Expertise nationales.

  • Certaines activités SMR actuellement peu voire pas présentes dans l’offre de soins devront être travaillées avec les partenaires :

    • Sur-spécialités au sein du SMR gériatrique (neuro-gériatrie, onco-gériatrie)
    • SMR polyvalent complexe

    • Offre SMR pour patients souffrant de troubles psychiatriques

    • Soins Palliatifs dans le champ SMR, actuellement insuffisamment développée

  • Développement, grâce à un Appel à Manifestation d’Intérêt, d’une offre nouvelle en SMR pédiatrique, correspondant aux recommandations de la HAS concernant la rééducation motrice intensive pour les enfants souffrant de paralysie cérébrale.

  • L’apport des nouvelles technologies : la place des outils technologiques pointus devra être précisée : exosquelettes, réalité virtuelle, rééducation robotisée, outils connectés, télé-réadaptation…

Par ailleurs, les objectifs du PRS-2 doivent bien sûr être poursuivis, notamment le développement de l’offre ambulatoire (en particulier en SMR gériatrie, qui reste peu développé), l’aide à la résolution des parcours complexes, et l’identification de filières oubliées.

Le secteur SMR est confronté depuis la mise en place de la réforme (juillet 2023) à des évolutions importantes. Cette réforme comporte deux volets, une réforme des autorisations, et une réforme du financement.

 Les grands principes de cette réforme étaient les suivants :

  • Réaffirmer la dimension médicale du secteur, en sortant de la notion historique de « soins de suite » pour devenir des « Soins Médicaux de Réadaptation »

  • Permettre une meilleure gradation des soins dans le champ du SMR, en introduisant notamment un troisième niveau (au-delà des SMR polyvalents et spécialisés), les Activités d’Expertise SMR.

  • Rétablir une équité entre les statuts d’établissements avec un mode de financement unique quel que soit le statut

  • Permettre une meilleure répartition des ressources, prenant en compte l’activité et le niveau de lourdeur/complexité des patients.

La réforme du financement

L’ancien système, avant la réforme (« SSR ») distinguait deux modalités de financement :

  • Un financement forfaitaire, déconnecté de l’activité, par le biais d’une Dotation Globale (DG) ou Dotation Annuelle de Financement (DAF) pour les établissements publics, et privés non lucratifs (ESPIC). 

  • Un financement au prix de journée pour les établissements privés lucratifs (prix de journée dépendant du type d’autorisation, mais non lié à la typologie ni à la prise en charge des patients).

Ce mode de financement a cependant eu comme conséquence de créer une inégalité entre les statuts d’établissement et de freiner le développement de l’offre dans le secteur sous DAF. 

Le nouveau mode de financement combine :

  • Une part activité (50% environ)

  • Une dotation populationnelle (40% environ) visant à sécuriser une part de recettes minimum des établissements et à permettre aux ARS de soutenir le développement de nouvelles activités 

  • Divers autres compartiments (Plateaux techniques spécialisés, financement des activités d’expertise, qualité…) permettant de valoriser spécifiquement certains aspects considérés comme onéreux de la prise en charge des patients dans ce secteur de soins.

La réforme des autorisations

Les grands principes de la réforme des autorisations sont les suivants :

  • Obligation de proposer sur site ou par convention les deux modalités HC et HJ

Jusqu’ici les établissements pouvaient proposer une activité de SMR en HC ou en HJ exclusivement. Désormais, ils auront l’obligation de proposer sur site (ou par convention) les deux modalités, HC et HJ. L’objectif est de favoriser le développement de l’offre ambulatoire.

  • Création de nouvelles mentions d’activité spécialisée (soumises à autorisation).

Depuis 2008, il existait 10 mentions spécialisées de SSR (ancienne terminologie), auxquelles se rajoutait le SSR polyvalent (ou indifférencié) :

  • Affections de l’appareil locomoteur

  • Affections du système nerveux

  • Affections cardio-vasculaires

  • Affections respiratoires

  • Affections des systèmes digestif, métabolique et endocrinien

  • Affections onco-hématologiques

  • Affections des brûlés

  • Affections liées aux conduites addictives

  • Affections de la personne âgée polypathologique, dépendante ou à risque de dépendance

La réforme introduit trois nouvelles mentions :

  • Pédiatrie, avec deux mentions :

    • Enfants et adolescents (4 ans et plus)

    • Jeunes enfants (jusqu’à 4 ans), enfants et adolescents

  • Oncologie

  • Par ailleurs, le SMR polyvalent, qui jusqu’ici était une autorisation « par défaut », ou servant uniquement de socle juridique pour les SMR spécialisés, devient une autorisation à part entière

Introduction d’un troisième niveau de gradation des soins, les Activités d’Expertise (AE) SMR

C’est probablement l’apport le plus important de la réforme des autorisations, permettant de mieux identifier les établissements ayant développé des activités pointues et complexes. Les AE concernent un nombre limité de patients, et n’ont pas vocation à être portées par tous les établissements, leur nombre étant limité. Il existe actuellement 14 AE SMR reconnues, avec une valorisation financière spécifique :

  • Neuro-orthopédie

  • SRPR

  • PREPAN (réadaptation PREcoce Post-Aiguë Neurologique) 

  • Unités EVC-EPR

  • Lésions médullaires

  • PREPAR (réadaptation PREcoce Post-Aiguë Respiratoire)

  • PREPAC (réadaptation PREcoce Post-Aiguë Cardiologique)

  • Troubles cognitifs et comportementaux des patients cérébro-lésés

  • Troubles cognitifs sévères liés à une conduite addictive

  • Obésités complexes 

  • Patients amputés, appareillés ou non

  • Equipes mobiles d’expertise en réadaptation (ex EMRR)

  • Et deux AE en SMR pédiatrique, mais sans financement spécifique (troubles des apprentissages et polyhandicap)

En conclusion,

l’Ile de France bénéficie d’un secteur SMR riche et fortement spécialisé, ce qui est un atout incontestable. La réforme crée des opportunités (développement des activités d’expertise, des plateaux techniques spécialisés, incitation à rouvrir des lits fermés) mais génère également au moins transitoirement des inquiétudes bien compréhensibles. Il faudra un temps d’adaptation aux acteurs et à l’ARS pour trouver un nouvel équilibre permettant de préserver cette offre de soins importante pour la population francilienne.